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BOURDAS Albert

Albert Bourdas est né à St Malo, le 12 juillet 1882. Reçu C.L.C. en théorie en 1899, notre ami débute à bord du CHATEAU LAFFITE le 19 mars 1900. Il navigue ensuite sur LAFAYETTE de la Cie Générale Transatlantique, puis sur le JARRE des Messageries Maritimes, au cours de l’année 1901, et avant d’effectuer son service militaire en 1902-1903, à bord du BRENNUS, à bord duquel les élèves de la Marine Marchande, faisaient leur année de service militaire, à condition d’être reçu à l’examen de sortie, condition nécessaire pour ne pas compléter les 4 années de service militaire, alors réglementaires pour les marins.
En sortant du service, Bourdas embarque sur le 4-mâts VALENTINE de la Cie Bordes, en qualité de 3ème lieutenant et fait un voyage du Chili, devenant ainsi Cap Hornier. Il débarque du VALENTINE pour embarquer comme 1er lieutenant sur le 3-mâts GERMAINE, à bord duquel, au cours des années 1904,1905, 1906, il fait un voyage d’Australie, Tahiti et Nouvelle Calédonie.
En 1907,après avoir obtenu son brevet de C.L.C., Bourdas rentre aux Chargeurs Réunis, où il fera toute sa carrière comme naviguant jusqu’en 1919, époque à laquelle il est retenu par la Cie des Chargeurs Réunis pour l’armement et le service maritime au Havre. Il navigue successivement sur CORSICA 1907 AMIRAL ESELMANN 1908, ENGLISH MONARCH comme subrécargue, 1909-1910, faisant les voyages du Brésil, d’Argentine, Chili, Caleta Buene, et Iquique.
En 1911, il commande, délégué par la Cie, le yacht SALVADOR. Puis il reprend la navigation commerciale : EUROPE en 1912, AMIRAL VILLARET JOYEUSE en 1913, AMIRAL FOURRICHON en 1914, LATOUCHE TREVILLE en 1916-1917, ANGO en 1917-1918, enfin l’ADEN en 1919.
Le 2 août 1914, notre ami se trouve à Grand Bassam, à bord de l’AMIRAL FOURRICHON qui est réquisitionné pour transporter des troupes à Dakar où il continue à être réquisitionné pour l’expédition contre le Cameroun. Il navigue en convoi, transportant des tirailleurs, sous la protection du vieux cuirassé BRUIX.
Après la prise de Douala, notre ami toujours sur le FOURRICHON, fait le transport de troupes et de matériel et ravitaillement sur l’Afrique, l’Amérique du Nord, du Sud, Indochine, et Tonkin.
En 1917, se trouvant à Saigon, la Marine de Guerre le réquisitionne pour aller chercher à Daïren, en Chine, avec le LATOUCHE TREVILLE, le général Lovitsky et les troupes russes qu’il ramène à Marseille pour le front français.
Il embarque alors sur ANGO. Bourdas est torpillé sur l’ANGO une 1ère fois le 26 novembre 1917 au large de Falmouth. Laissons-lui la parole :
A 4 h, du matin, nous recevons une torpille par le travers de la cheminée. Le navire est évacué par l’équipage dans les embarcations à l’exception du commandant, des 5 canonniers et de moi-même. Au petit jour, le sous-marin revient sur nous. Nous ouvrons le feu avec nos canons de 90, et grâce aux obus, éclatant au contact de l’eau, nous l’empêchons de se rapprocher et de faire surface. Il nous gratifie de 2 nouvelles torpilles qui passent sous la quille avant, du fait du déjaugeage dû à l’eau qui a envahi les machines et les chaudières où, malheureusement tout le personnel de quart a été tué. Les canonniers effrayés par les craquements des cloisons étanches, sont autorisés à quitter le bord, à bord d’une baleinière qui étant à proximité, vient les chercher. Une heure après environ 2 remorqueurs anglais arrivent sur nous, très déçus en constatant que le navire n’est pas abandonné ! Cyniquement, ils se refusent à prendre les 2 aussières que le Commandant et moi avons affalées par les écubiers du gaillard. Pour nos bons et excellents alliés anglais, le business ne perd pas ses droits. Dialogue peu tendre entre eux et nous ! Une demi-heure après, un avion de repérage volant à basse altitude, nous aperçoit. Nous lui exposons par gestes la situation, et ayant compris, il donne l’ordre aux remorqueurs de nous prendre. Ils nous échouent sur un banc, dans la baie de Falmouth. En faisant route, nous retrouvons nos embarcations qui nous prennent en remorque et l’équipage remonte à bord.
Le 26 juillet 1918,l’ANGO qui a repris la mer est à nouveau torpillé à 10 h 30 le matin en Mer de Nord : J’étais de quart à la relève, avec le pilote côtier Anglais, beau temps, légèrement brumeux. Il me dit: lieutenant nous arriverons sans encombre. Je me retourne pour lui répondre et je vois la torpille sortir du sous marin; elle godille 1 à 2 secondes et prend sa trajectoire rectiligne, se dirigeant droit par le travers de la passerelle. Je n’ai que le temps de l’empoigner par le bras et de le pousser dans la chambre de veille en lui disant : non, nous allons sauter ! . Une colonne d’eau d’une trentaine de mètres, la baleinière de tribord enlevée à hauteur de la cheminée, et le tout retombant sur le roof central. Le maître d’hôtel entrait juste au carré avec le second plat et le déjeuner s’arrêta là. II y eut encore malheureusement une victime, l’homme de vigie qui par la vibration de la mâture fut lancé par-dessus le nid de pie et s’écrasa sur un treuil.